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 Selon Alex Fishman (ICI), le Ministre de laDéfense, Ehud Barak, est arrivé à la table du Cabinet restreint, samedi 20 août, pour y déposer un document détaillé, intitulé : « Opération Sud », remake approfondi de « Plomb Durci ». Ce plan d’attaque très complet n’attendait plus que l’approbation des autres décideurs pour entrer en vigueur immédiatement et frapper, un à un, tous les leaders des groupes palestiniens et leurs infrastructures, à commencer par le tête de liste : le Hamas. 

 

 

L’opération ne devait pas se limiter à une pure et simple réplique à l’attentat complexe de l’autoroute d’Eilat. Elle n’avait rien d’un coup de colère. L'évaluation prenait en compte que les cibles désignées avaient toutes les chances d’entraîner un embrasement régional. Plus aucun dirigeant à Gaza n’était couvert par une immunité quelconque. Haniyeh, en premier lieu, aurait donc sauté, et ainsi de suite, par effet domino. Les cibles, l’échelle, le timing n’aurait laissé aucun espace de respiration au Hamas pour seulement envisager de lancer ses propres répliques. Le week-end entier a été consacré, aux Quartiers-généraux, à la préparation de cet ouragan. Le personnel y a travaillé jour et nuit et dormait à même les bureaux. On s'est souvenu, bien sûr, de la posture arrogante et du climat de totale improvisation qui avaient prévalu lors de la Seconde Guerre du Liban, sur cette même impulsion de frapper, sans laisser le temps à l’adversaire d’y parer. On avait alors mal calibré ses conséquences, sur la sécurité intérieure face aux répliques de l’ennemi, l’équipement insuffisant des forces et la logistique, la pleine coordination entre les différents corps d’armée impliqués…  Rien de cela, cette fois-ci, le moindre détail entrait en prévision, avant que le document ne soit déclaré opérationnel et présentable face à l’échelon politique.

  

 

Une autre leçon tirée de la misérable performance du Commandement au Liban contre le Hezbollah est qu’une telle opération doit débuter par le déclenchement d’une pleine puissance de feu : elle dégage le front intérieur en empêchant qu’il n’en subisse le contrecoup d’un feu adverse organisé et relativement précis. C’est l’option choisie pour la première opération Plomb Durci, qui a infléchi drastiquement et en relativement peu de temps, la capacité de répliquer, chez les artilleurs du Hamas en fuite pour échapper à leur juste châtiment. 

 

 

 

Que voulez-vous savoir, au juste?

 

La grande majorité des forces opérationnelles israéliennes étaient déjà prévenues et prêtes à être enrôlées pour cette mission, les unes après les autres. Toute l’armée régulière a été placée en état d’alerte pour intervention imminente, dès ce samedi 20. Les escadrilles aériennes mettaient les derniers préparatifs au point. Ce délai nécessaire à la planification militaire laissait juste un temps de battement à la diplomatie de façon à s’organiser pour tenter d’éviter encore la conflagration foudroyante et chercher une alternative. Ces négociations de la dernière chance restent entre les mains de l’Egypte et des Etats-Unis.

 

Dès jeudi après-midi, peu de temps après les attentats d’Eilat, les stratèges ont commencé à plancher sur la priorisation des frappes à mener. Au départ, il a surtout été question de cibles du Jihad Islamique et des Comités populaires de la Résistance. Les destructions imposées à certaines infrastructures du Hamas l’étaient à titre indicatif, lui faisant comprendre qu’il reste tenu pour seul responsable de toute attaque provenant de Gaza.

 

Peu de temps après, le haut échelon des Comités populaires était décapité par une frappe chirurgicale [expression signifiant perdre la tête, au sens propre, reprise en exergue par Barak, à bon entendeur, salut]. Les chefs du Hamas, politiques ou militaires ont immédiatement compris qu’Israël était déterminé à frapper. Tous se sont alors rapidement disséminés vers des planques, pour éviter d’être la prochaine tête sur la liste. Seuls des porte-parole de second plan se sont vus confier la tâche de s’expliquer face aux caméras.

 

 IDF strike in Gaza (Photo: AP)

Jihad! Jihad! Jihad!

 

  Les prochaines cibles étaient, effectivement, les cerveaux du Hamas. A ce stade, l’hypothèse logique restait que ceux qui tiennent les rênes à Gaza ne pouvaient pas ne pas savoir ce qui allait se passer en lisière d’Eilat le 18 août. Des réunions stratégiques hebdomadaires rassemblent les diverses factions autour de la même table. Les relations de vassalité sont telles entre les clans qu’il paraissait impensable qu’il n’en soit pas allé ainsi, cette fois-là.

 

Ce point de départ, clé de l’opération à venir, a rétrospectivement été remis en cause par les experts sécuritaires d’Israël. Au grand étonnement des meilleurs spécialistes, tout concordait pour démontrer que les préparatifs de l’attentat ont été menés dans le dos du Hamas. Soudain, l’Iran et la Syrie ne confient plus directement les tâches à cette succursale des Frères Musulmans, tombée sous le charme de la « Nouvelle Egypte ». Il leur faut d’autres exécutants totalement soumis à leurs impulsions et à leur mode de fonctionnement.

 

Iron Dome missile defense system (Photo: Avi Roccah)

Dôme de fer. 


Quoi qu’il en soit, le compte à rebours avait déjà commencé. Des réservistes d’unités combattantes étaient appelés en renfort. Samedi 20 au soir, 24h seulement séparait Gaza de l’offensive à grande échelle qui allait lui passer l’envie de se lancer dans des attentats hasardeux. Dans la nuit, les chefs du Hamas comprenaient que le sablier fuyait du mauvais côté. C’est alors qu’ils ont appelé toutes les factions à un cessez-le-feu unilatéral, sous tutelle égyptienne.

 

A ce moment-là, les décideurs israéliens ont perçu la confusion qui régnait au Hamas. Des tirs de roquettes persistaient sur Ofakim et BeerSheva, qu’il ne controlait pas. Il déléguait des responsables pour infléchir la volonté des cellules du Jihad Islamique et leur intimer de stopper ces tirs. Les envoyés du Hamas étaient déjà au Caire pour trouver une sortie de crise rapide, et le haut-commandement de Tsahal en était virtuellement informé en temps réel.

 

Don't want to be blamed for botched statehood bid. Haniyeh and Abbas (Photo: Reuters)

Rira bien qui rira le dernier...

 

Dans la perspective du groupe islamiste dominant, il ne souhaitait pas porter la responsabilité de l’échec de la tentative d’Abbas devant l’ONU, en septembre et de la division du camp palestinien qui s’accentuerait alors. De plus, sa situation économique empire, les salaires ne parviennent plus d’Iran : le groupe est sanctionné pour ne pas ouvertement soutenir la répression en Syrie. Ses hommes risquaient donc de répondre de façon plus évasive encore à un ordre quelconque de faire face à Israël au péril de leur vie. Mieux vaut, pour lui, faire traîner les choses dans la négociation sur Guilad Shalit. L’autre crainte est que l’Egypte ferme, purement et simplement, le passage de Rafah, le privant de l’autre voie d’approvisionnement. Et la seule interprétation qui tienne, lorsqu’Israël évoque une « réplique disproportionnée » aux tirs de roquettes, correspond à une vaste opération au sol visant à l’éradiquer.


 

Ismaïl Haniyeh n’a osé sortir de son bunker que le mardi suivant. Tous les autres dirigeants de premier plan du Hamas et du Jihad islamique sont toujours aux abris, parce qu’ils ont quelque chose à se reprocher, de toute évidence. Les éliminations d’Asmar et de plusieurs autres artificiers et contrebandiers du Jihad, à cheval sur la frontière du Sinaï, se poursuivront. Le message est que ces frappes chirurgicales ne sont pas limitées dans le temps, même si elles se paient de nouveaux tirs de roquettes sur le Sud israélien.

 

 

Américains et Egyptiens ont demandé à Israël d’adhérer à la proposition de trêve du Hamas, depuis la nuit du samedi 20. L’Egypte s’est engagée à infléchir progressivement l’importance des manifestations de rue anti-israéliennes au Caire. Sans la suspension de l’opération prévue, le Caire affiche qu’il n’est ni en mesure d’accomplir pleinement son rôle de médiateur à l’égard du Hamas, ni de réellement contenir les émeutes en Egypte qui suivraient immédiatement une entrée en force de Tsahal à Gaza.

 

Au grand conseil de Jérusalem, d’autres risques ont été évoqués : une position de faiblesse médiatisée et de mise en accusation d’Israël, à la veille de l’escapade d’Abbas à l’ONU, ne serait pas de bonne augure. Des états hésitants y trouveraient facilement une occasion de sanctionner, à nouveau, l’Etat hébreu. D’autre part, de nombreux pays alentour sont en situation d’extrême fragilité, en cas d’embrasement : comme la Jordanie, qui risque, chaque jour, un coup de force des Islamistes pro-Hamas. La Turquie joue un rôle accru à Gaza et les relations ne pourraient alors que s’envenimer un peu plus avec Ankara.

 

Le consensus est demeuré difficile à trouver, lors de cette réunion au sommet. Le Shin Bet, malgré tous les effets secondaires passés en revue, quant à l’hostilité régionale, s’affichait partisan de frapper vite et fort. Il s’est engagé à apporter les moindres détails des planques des principales cibles. Le renseignement militaire a fait pesé que le Hamas n’a, pour ainsi dire, pas déclenché une seule roquette, durant toute la durée des attaques contre les villes du Sud. C’est la première fois, dans toute l’histoire du conflit, que ses infrastructures sont touchées, des hommes à lui sont tués et que le groupe d’Haniyeh n’ose pas même lever un petit doigt pour s’y opposer ni chercher à les venger. Si le Hamas se couche, selon de hauts-gradés, la panique qui s’est emparée de ses chefs démontre que la dissuasion d’Israël marche bien et que seuls les commandos-suicide pro-iraniens sont disposés au sacrifice.

 

En milieu de semaine, le niveau d’alerte a baissé d’intensité. Puis, d’autres renseignements sont arrivés, au sujet de la préparation de nouveaux attentats du type de ceux d’Eilat. A la même période, fin de la semaine précédente, le Shin Bet a capturé 150 membres du Hamas dans le secteur d’Hébron, en Judée-Samarie. C’est la plus grosse opération du genre, depuis le pic d’alerte de la IInde Intifada, en 2002.

 

Devant parer à toute éventualité en septembre, Tsahal vit actuellement à plein régime et l’armée n’échappera pas à la nécessité d’affecter des réservistes aux diverses missions prévisibles. Quoi qu’il en soit, de la même façon qu’Israël était sur le point de déclencher la guerre, samedi en huit, le même scénario est sur le point de tomber comme un couperet sur les têtes terroristes, à tout moment, dans les temps à venir.

 

Le programme est fin prêt, il n’attend que le signal qu’il est grand temps d’en finir avec la Qalifat gaza-sinaïtique d'Haniyeh.

 

Par Marc Brzustowski

Pour © 2011 lessakele et © 2011 aschkel.info

Tag(s) : #Israel
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